dimanche 21 septembre 2014

La didactique du Français de scolarisation dans le cadre du cours d’Etude du milieu en DASPA



La didactique du Français de scolarisation dans le cadre du cours d’Etude du milieu en DASPA
Auteur : Yohann Fleury (coordinateur DASPA – Institut de la Providence, Anderlecht)
Co-auteurs : Youssef Bouazza et Pauline Paquet (enseignants  DASPA – Institut de la Providence)

Introduction
Pendant plusieurs années en classe passerelle, beaucoup d’écoles ont privilégié l’apprentissage du français exclusivement : en effet, les heures de Formation scientifique (seulement les 4 heures de mathématique) et de formation humaine (sciences humaine) étaient réduites et réinjectées dans les cours de Français. Les DNL (disciplines non linguistiques : sciences ou sciences humaines) sont souvent simplement mises de côté. Le cours de math, en particulier, est souvent abordé de manière purement disciplinaire : l’aspect linguistique FLE est trop souvent négligé par manque de formation des enseignants de ces DNL.
A l’Institut de la Providence d’Anderlecht, des cours de F.S. sont donnés depuis le début (2OO1), mais depuis 2009, et l’arrivée d’une nouvelle équipe de coordination et de direction, une réflexion a été menée sur ces cours et l’organisation pédagogique a été revue pour répondre au mieux aux missions.
Contexte légal et pédagogique
Selon les décrets du 14/06/2001 organisant la Classe passerelle et du 18/05/2012 organisant le DASPA, nos missions sont :
1 – assurer l'accueil, l'orientation et l'insertion optimale des élèves primo-arrivants dans le système éducatif de la Communauté française;
 2 – proposer un accompagnement scolaire et pédagogique adapté aux profils d'apprentissage des élèves primo-arrivants, notamment les difficultés liées à la langue de scolarisation et à la culture scolaire;
 3 – proposer une étape de scolarisation intermédiaire et d'une durée limitée, conformément à l'article 9 du présent décret, avant la scolarisation dans une classe de niveau ;
par l’apprentissage ou le renforcement du français, mais aussi par les DNL (disciplines non linguistiques : math, sciences, histoire-géographie).
Dans notre école, à l’Institut de la Providence à Anderlecht, la semaine de 28 heures de cours se composent donc ainsi :
15 heures de formation humaine :
-          10 heures de français
-          3 heures de sciences humaines
-          2 heures d’atelier dessin
8 heures de formation scientifique :
-          4 heures de mathématique
-          2 heures de sciences
-          2 heures de travaux sur ordinateur
Ainsi que 3 heures d’éducation physique et 2 heures de religion.
Actuellement, il existe beaucoup de méthodes de français sur le marché pour donner le cours de Formation humaine (français) aux primo-arrivants en DASPA (Dispositif d’accueil et de scolarisation pour élèves primo-arrivants - ex-classe passerelle) en Fédération Wallonie-Bruxelles de Belgique. Certaines, comme « Entrée en matière » intègrent quelques éléments de sciences, de mathématiques voire de culture générale, mais le contexte reste très franco-français.
Cependant, le cours de Formation humaine, avec ses trois heures de sciences humaines par semaine, ne fait pas l'objet d'un programme ou d'une méthode spécifique pour les professeurs qui l'enseignent.
Contexte
Dans le cadre du DASPA (Dispositif d’accueil et de scolarisation pour élèves primo-arrivants), nous accueillons, dans notre école, des élèves entre 12 et 18 ans.  Nous avons différents groupes correspondant au niveau de scolarité et de connaissance du français. 
Selon l’origine des élèves, et leur âge, la poursuite de leurs études secondaires se fera selon différents parcours (CIE : conseil d’intégration élargie, fournissant une attestation d’admissibilité), intégration en 1D (si pas de CEB) ou équivalence (sur base des documents traduits amenés par les élèves).
Besoins
Lorsqu’ils seront intégrés dans l’une des années de l’enseignement secondaire, les élèves auront des cours d’EDM ou de sciences humaines. Les enseignants qui accueillent ces élèves remarquent souvent des lacunes dans les savoirs spécifiques d’histoire et de géographie, et des difficultés à comprendre les consignes par la non-connaissance de certains savoir-faire.
C’est pourquoi, depuis 2009, à mon arrivée au poste de coordinateur de la classe passerelle, il m’a semblé important que les élèves aient un cours d’EDM dans la grille horaire. Nous y consacrons donc 3 heures par semaine sur les 15 heures de formation humaine. Cependant, il n’existe pas de programme spécifique au DASPA dans les différentes DNL (disciplines non linguistiques : math, sciences, EDM).
Un cours d’EDM en DASPA a pour objectif de faire acquérir aux élèves le vocabulaire et les connaissances de base d'histoire et de géographie belge et européenne pour une meilleure intégration dans l'enseignement secondaire belge et dans leur future vie de citoyen belge.
Les élèves devront également être capables :
● D’utiliser les outils de référence en EDM : l'atlas et la ligne du temps
● De se situer dans l'espace et dans le temps.
Le français de scolarisation de la discipline Histoire-géographie/EDM
Lors d’une conférence sur le DASPA devant des élèves de Master FLE en novembre 2012, un étudiant m’a demandé si c’était un cours de science ou de français. Ce n’est ni totalement un cours de sciences (avec des élèves francophones), ni totalement un cours de FLE.
Michèle Verdelhan-Bourgade, dans son ouvrage « Le Français de scolarisation »[1],  écrit qu’à la différence du FLE, (un enseignement scolaire comme une discipline parmi d’autres, sans répercussions sur les autres matières), le « français de scolarisation sert à la mise en place des savoirs dans les autres disciplines ».
D’après Marisa Cavalli, dans « Formation initiale et profils d’enseignants de langues  »[2], la langue de scolarisation est une « langue officielle (une seule, voire plusieurs langues dans certains états) ou variété étrangère dans laquelle sont effectués les/des enseignements de disciplines dans le système scolaire. Cette langue n’est pas toujours la langue « maternelle » des élèves ; en tout état de cause, cette langue de l’école inclut des formes discursives (écrites, en particulier) qui ne sont pas connues des jeunes apprenants ». Elle précise que l’enseignement des langues de scolarisation se caractérise par deux dimensions :
-          « langue comme matière » avec ses composantes et ses objets propres d’apprentissage
-          « langue des autres matières », quand elle est utilisée comme moyen pour l’enseignement et l’apprentissage des autres matières à l’école (les DNL).

Les cours de DNL doivent trouver un juste milieu, un point de rencontre, car notre objectif premier est d’aider l’élève à acquérir le vocabulaire et les connaissances de base d’étude du milieu pour une meilleure intégration dans l'enseignement secondaire belge.
Marisa Cavalli[3],  explique qu’il y  a une langue appropriée aux objets disciplinaires et chaque discipline a ses propres objets, phénomènes, évènements et processus à décrire, à analyser dans leur composantes, à recomposer dans leur unité. Il ne s’agit pas seulement de lexique, comme souvent même les enseignants expérimentés l’imaginent, bien que le lexique joue un rôle de premier plan dans la construction conceptuelle et qu’il faille y travailler. Ce sont, en effet, plutôt des genres discursifs spécifiques à chaque discipline. On ne parle pas de la même façon d’un processus historique ou d’un théorème de mathématique. Par contre, certains moyens sémiotiques ou représentations conceptuelles peuvent être communes à plusieurs disciplines : par exemple, les diagrammes utilisés en mathématiques, géographie, histoires, sciences … ; les cartes employés en histoire, géographie, sciences, etc ; la frise chronologique en histoire, en sciences… ; les symboles mathématiques et en physique, etc ; d’autres peuvent être spécifiques à certaines disciplines (les formules en chimie ou en mathématiques).
Sans la connaissance d’un vocabulaire spécifique, la compréhension des consignes, mais également la maîtrise du discours scientifique, l’élève risque d’être perdu après son intégration dans l’enseignement secondaire.
Gérard Vignier[4] explique qu’une discipline, scientifique ou artistique, a pour objectif la mise en place et l’acquisition de savoirs ou de savoir-faire. Le langage verbal assume, à cet effet, différentes fonctions :
-          Aider dans la classe à l’acquisition de ces savoirs ou de ces savoir-faire
-          Nommer les notions, les concepts, les opérations engagées, analyser et commenter les résultats.
D’après lui, il existe une variété de DNL selon qu’elles sont classées dans les sciences humaines, les sciences ou les mathématiques.  Et tout texte/discours scientifique est constitué d’un langage composite qui peut comprendre :
-          Des éléments verbaux, mots inscrits dans des phrases, dans des textes
-          Des éléments numériques, algébriques
-          Des éléments géométriques (tracés divers)
-          Des éléments graphiques (courbes, histogrammes, etc.)
-          Des éléments cartographiques (représentations dans l’espace)
-          Des éléments schématiques combinant des éléments figuratifs et/ou des symboles spécifiques
Pour Jacqueline Demarty-Warzée[5], le discours désigne l’ensemble des messages, textes et documents – écrits et oraux, iconiques, sonores ou autres – qui s’échangent dans un domaine particulier. Elle parle de « discours scientifiques » pour aussi bien pour les sciences humaines (histoire, géographie) ou les sciences « plus dures » (physique, chimie Biologie et mathématiques).  Chaque domaine disciplinaire possède ses discours qui possèdent des caractéristiques remarquables.
Pour s’approprier les discours spécialisés d’une discipline, elle conseille au professeur de DNL d’examiner de près les manuels  pour observer  comment ils sont rédigés. Ainsi ils pourront mieux découvrir comment fonctionne le français de leur discipline. Elle propose trois entrées pour aller à la découverte des discours de disciplines[6] :
-          entrée lexicale ;
-          entrée par les structures récurrentes ;
-          entrée discursive.

Entrée lexicale
Le vocabulaire spécifique s’oppose généralement au vocabulaire courant et sert à désigner des concepts ou des notions, des phénomènes, des institutions, des éléments etc. relevant d’un domaine donné. Le maitriser est indispensable. Certaines DNL ont un lexique très spécifique, mais la plupart recourent à l’emploi de termes – substantifs, adjectifs, verbes – qui ne prennent un sens spécifique qu’en fonction du contexte où ils se trouvent. Il conviendra donc l’expliciter dans le contexte de la DNL. Dans certains cas, le lexique spécifique sera mis en valeur dans les manuels, via les mots-clés, ou alors il sera mis en italique, en gras, entre guillemets.
Michelle Verdelhan-Bourgade[7]  précise que les discours caractéristiques des manuels se disent dans une langue dont l’appropriation par des élèves peut être considérée comme un facteur capital de l’intégration scolaire. Pourtant la conception de la norme en Français de scolarisation semble hésiter entre celle d’un français langue internationale de prestige et celle d’une français proche des réalités du pays, avec un net avantage à la première. Pourtant, si l’on veut intégrer au mieux un élève de DASPA dans l’enseignement secondaire belge, le lexique scolaire belge sera plus utile qu’un lexique de collège en France.
Histoire
Géographie
Lexique relatif au temps (jours, mois, saisons, calendrier, siècle, ère etc.)
Lexique relatif aux continents, pays, nationalités, capitales et villes, fleuve, mer et océan
Lexique relatif aux périodes conventionnelles de la ligne du temps
Les 4 points cardinaux
Lexique relatif aux traces du passé (objet, monument, doc écrit, photo)
Lexique relatif aux paysages (espace naturel, urbain et industriel)
Moment-clé : rupture, évènement
Lexique relatif aux modes de vie (activités et technique : s’alimenter, se loger, se déplacer, se vêtir, se soigner)
Avec l’aide de notre enseignante en EDM en DASPA, nous mettons également en place avec les élèves les plus avancés en français ce que nous appelons « le bain belge » : l’enseignement de matière spécifique du contexte belge comme :
-          Histoire belge :
o    Réaliser une ligne du temps des grandes périodes de l'histoire de la Belgique avec les personnages historiques (Ambiorix, Albert de Habsbourg et Isabelle d'Espagne, Napoléon, Guillaume 1er)
o    Réaliser une ligne du temps de la monarchie belge depuis son indépendance (roi, reine, princes) Film « Daens », DVD "Moi, Belgique"
o    Travail de recherche sur l’histoire de Bruxelles sur base d’un article
-          Histoire européenne récente :
o    Réaliser une ligne du temps des grandes étapes de la construction de l'Union européenne
o    Visite du point Info au Parlement Européen
-          Culture belge :
o    Réaliser une carte des spécialités culinaires belges
o    Réaliser un dossier sur les auteurs de BD + visite du musée belge de la BD
-          Géographie mondiale :
Etude de la carte du monde, des continents et des pays de provenance des élèves
-          Géographie européenne :
Réaliser une carte d'Europe avec les pays, leur capitale, les mers
-          Géographie belge :
Réaliser une carte de la Belgique avec les provinces, les capitales de province, les fleuves et les points culminants, les pays frontaliers, la mer.
-          Découverte de Bruxelles :
Visite guidée historique et culturelle du centre de Bruxelles avec découverte des transports en commun

Importance des énoncés et des consignes
Nombres d’échecs dans la résolution des tâches scolaires proviennent d’une mauvaise compréhension des consignes. On le voit chaque année lors du CEB avec les élèves ex-classe passerelle. Pour n'importe quel élève, mais encore plus peut-être pour des primo-arrivants, les énoncés et les consignes doivent être clairs et compréhensibles pour leur permettre de résoudre la tache ou l'exercice qui leur est demandé.
Michèle Verdelhan-Bourgade[8] voit deux raisons majeures à l’incompréhension des consignes : les obstacles linguistiques et les consignes nécessitant des opérations mentales.
Le vocabulaire des consignes mérite d’être travaillé avec les élèves pour les aider à progresser. Certains mots tout à fait courant dans le langage social changent de sens  dans le jargon scolaire :

Mots
Sens social
Sens scolaire
Ranger
Mettre de l’ordre
Classer
Légende
Conte
Énoncé sous un dessin
Relever
Mettre debout
Repérer, noter
L’exécution de la consigne suppose d’abord des connaissances pragmatiques en matière de :
-          Situation de classe, pour comprendre  de quel domaine de connaissances il s’agit ;
-         Références extérieures, les énoncés des problèmes faisant souvent appel à des faits de société ou des éléments d’actualité.

Michèle Verdelhan-Bourgade[9] indique que pour construire un programme pour un cours de DNL, on peut au préalable essayer de classer les consignes en catégories :
-          Les consignes comportant un geste graphique (souligner, encadrer, rayer, dessiner …) ;
-          Les consignes relevant de catégories mentales générales (analyse, synthèse, classement…) ;
-          Les consignes spécifiques d’une discipline (calculer, soustraire, dater …) ;
-          Les consignes concernant des opérations discursives (nommer, décrire, raconter, expliquer…).
Elle ajoute que beaucoup de consignes basiques concernent souvent deux ou davantage de disciplines, ce qui constitue un argument supplémentaire à un travail langagier sur les DNL.
Consignes
Disciplines
Épeler, nommer
Français, sciences, histoire-géo
Classer
Faire correspondre
Français, sciences, math

Les différents auteurs montrent bien qu’il est nécessaire de travailler ce type de discours, dont la compréhension et l’exécution vont conditionner une grande partie de la réussite de l’élève primo-arrivant après son intégration dans une classe de l’enseignement secondaire.
Comme le dit Marisa Causa[10], l’enseignement/apprentissage d’une discipline aboutit à l’acquisition, au moins partielle, d’une langue et d’une culture caractérisée par ses propres genres de discours, susceptible d’enrichir et de diversifier l’identité même de l’apprenant, le transformant en membre d’une communauté de pratiques.
Elle insiste sur le lien entre les disciplines et le monde réel : « si l’on dit des langues qu’elles sont autant de façon d’interpréter le monde, on peut en dire autant des disciplines. Chacune est une façon de (perce)voir le monde, une vision/perception/conception du monde.
Entrée par les structures récurrentes
Dans son article[11], Jacqueline Demarty-Warzée a mis en évidence les structures temporelles récurrentes dans la DNL d’histoire-géographie.
Marqueurs temporels
Exemples
Les dates 
Le 21 juillet 1830, en l’an 800, en ce moment, jusqu’à présent, de nos jours, à cette époque ….
Avant, après, plus tôt, plus tard, souvent, parfois, jamais

Depuis
Depuis les années septante …
Pendant
Pendant  le règne de Léopold II …
Pendant que, tandis que, alors que
Pendant que la Reine Elisabeth soignait les malades…
À partir de
A partir de l’invasion allemande en 1940 …
Il y a
Le Roi Beaudouin est mort Il y a 20 ans.
De … à
Le roi Albert II a régné de 1993 à 2013.
De nos jours (= actuellement)
De nos jours, la population belge est …
Dès
Dès la promulgation de l’arrêté royal, 

Autres marqueurs
Exemples
Marqueurs spatiaux : à droite, à gauche, au sud, à l’est, à l’ouest, au nord, en face, devant, derrière, entre …
La Belgique se trouve au nord de la France.
Marqueurs de la cause : à cause de, grâce à, faute de, puisque …
La Révolution belge a eu lieu à cause de …
Marqueurs de la conséquence : ainsi, c’est pourquoi, les verbes : entraîner, provoquer

le but : en vue de, pour/afin de …

de l’opposition : mais, cependant, en revanche, par contre …


Entrée discursive
D’après Gérard Vignier[12], les DNL des sciences humaines font usage du langage verbal, pour désigner, définir les notions, entreprendre les opérations de raisonnements, commenter documents et schémas, consigner des résultats.
Dans les manuels d’histoire, on trouve des documents variés comme point de réflexion et d’analyse pour les élèves (avec souvent des présentations différentes et des images) et des textes à fonction expositive plus ou moins longs qui s’articulent avec ces documents.
Le professueur de DNL devra aider ses élèves à décoder les types de discours :
Texte descriptifs :
Jacqueline Demarty-Warzee[13] explique que, dans la plupart des disciplines, il est demandé à l’élève de décrire ce qu’il fait, ce qu’il voit etc. Or, on peut apprendre à décrire, soit à comprendre des descriptions, soit à en produire soi-même dans le cadre des activités scolaires.
Quelques régularités sont remarquables :
-          Mots en relation avec les cinq sens :
-          Présence de mots évoquant l’espace, le lieu :
-          Emploi de verbe d’état : être, paraître, sembler, etc.
-          Comparaisons et métaphores
-          Emploi de l’imparfait ou du présent (voire le passé simple en histoire)

Narration :
Jacqueline Demarty-Warzee [14] explique que certains marqueurs de la narration sont remarquables dans les textes d’histoire :
-          L’emploi de certains temps comme le passé simple ou le présent de narration. Il faut remarquer que le passé simple n’est bien-sûr pas le premier temps étudié en FLE. Le professeur de DNL devra décoder les verbes pour la bonne compréhension du texte d’histoire.
-          Les marques typographiques ou entailles : les mots en gras, en italique, entre guillemets ou en lettres capitales sont courant dans les textes d’histoire. Leur présence n’est pas innocente, il faudra les décoder avec les élèves :
Ex : l’Entente cordiale – la Drôle de guerre – Chaque tribu a sa capitale, appelée « oppidum ».
-          Description connotative : Les descriptions ne sont pas toujours dénotative, mais contiennent parfois des symboles. Certains mots peuvent avoir plusieurs sens, une valeur positive, négative ou neutre. Il est important de décoder ces sens avec les élèves :
Ex : le roi Soleil : le mot Soleil a une autre valeur que dans «  la distance Terre-Soleil » ou le soleil, cause de cancer de la peau.

Reformulation :
Reformuler, c’est dire la même chose autrement, en résumant ou en développant. Des marqueurs spécifiques peuvent aider à reconnaitre la reformulation :
-          Connecteur métadiscursif « c’est-à-dire »
-          Certains procédés linguistiques :
o    En d’autres termes, en un sens, en somme, en résumé, en bref, ou, ou bien, ou bien encore
o    La juxtaposition : X, y : Albert Ier, le roi chevalier
o    La reprise anaphorique
o    Terme comme une sorte de, une espèce de, un genre de, etc.
o    Synonymes : Le roi, ce monarque éclairé …
o   Verbe être : La Belgique est une monarchie constitutionnelle.

Argumentation :
En sciences humaines, on utilise l’argumentation pour défendre une thèse ou un point de vue pour convaincre, c’est-à-dire pour modifier l’univers de croyance d’autrui. Elle peut se reconnaître avec :
-          Des articulateurs logiques : certes … mais ; mais ; néanmoins/reste que/pourtant/toutefois/cependant, etc
-          Marques de personnes : je / nous / on / tu / vous
-          Le temps du discours : présent, passé composé, futur proche
-          L’utilisation de guillemets, d’italiques, de parenthèses, de points d’exclamation ou d’interrogation etc.

Pistes didactiques
Comme le dit Fabrice Peutiot[15], du CASNAV de Grenoble, il faut mettre en place un apprentissage continu en compréhension de l’oral et de l’écrit en Français langue de scolarisation, pratiquer une pédagogie du projet, en approche actionnelle en interdisciplinarité. Le professeur de FLE et de DNL devraient travailler ensemble pour créer ce type de projet.
Depuis cette année scolaire 2012-2013, notre équipe d’enseignants travaillent, en collaboration avec des conseillers pédagogiques, à la rédaction de référentiels pour les 3 DNL enseignées en DASPA. A l’aide du socle des compétences, les compétences,  les savoir-faire et les savoirs spécifiques sont sélectionnés par niveau et une réflexion est menée quant au français de scolarisation à enseigner dans ces différentes branches.
Le référentiel en EDM, avec sa composante Français de scolarisation, se présentera sous la forme d’un tableau reprenant les savoir-faire communs, les savoir-faire et les savoirs spécifiques en histoire et en géographie issus du « Socles de compétences ».
Un travail de répartition de ces savoirs a été effectué en fonction de 3 niveaux :
-          Niveau 1 : élèves analphabètes
-          Niveau 2 : élèves du niveau CEB ou entrée vers une 3ème professionnelle
-          Niveau 3 : élèves du niveau fin du CE1D ou plus
D’autres pistes didactiques sont actuellement en cours d’élaboration dans notre école :
-          Fiches d’apprentissage Histoire-sciences-Français de scolarisation :

Un jour, lors d’un échange avec Luc Collès, il m’a parlé de son enfance et d’une enseignante qui, pour faire aimer les mathématiques aux élèves, voyait pour chaque concept, l’histoire de ce concept : qui était le mathématicien à son origine ? Dans quelles conditions avait-il élaboré ses théories ?
Cette conversation m’a inspiré  pour la création des fiches d’apprentissage liant les sciences à l’histoire en y incorporant les éléments de français de scolarisation nécessaire à la compréhension du concept.






-          Jeux de cartes sur l’histoire des scientifiques du monde :

Dans le cadre d’une collaboration avec Youssef  Bouazza, enseignant de FLE, nous avons demandé aux élèves de sa classe en 2012/2013 d’effectuer une recherche sur une série de 10 familles de scientifiques (antiquité, période arabo-andalouse, Moyen-Orient, Asie, France, Belgique-Pays-Bas, Allemagne, Royaume-Uni-Etats-Unis, Europe du Nord, Europe du Sud).

Ils ont réalisé des petites cartes présentant les données de base (date et lieu de naissance et de décès, métier, principales découvertes). Celles-ci ont été plastifiées pour réaliser un jeu.

Celui-ci peut être exploité soit en les classant par thématique scientifique, soit en les classant sur une ligne du temps.

-          Propositions d’activités liant EDM et FLS

Une enseignante de l’Institut de le Providence, également bibliothécaire et responsable des sorties pédagogiques  (future régente en Sciences humaines), Pauline Paquet, a développé diverses activités d’EDM pour les élèves du DASPA.

Pour chaque visite organisée pour les élèves primo-arrivants, elle a développé une stratégie :

-          Préparation de la visite : apprentissage du lexique, acquisition de savoir-faire et de savoirs spécifiques qui sont utiles pour la visite
-          Au moment de la visite : travail écrit individuel ou en groupe d’application des savoir-faire
-          Activité de synthèse :
-          Evaluation écrite

Visite
Thématique
Parc du Scheutbos (Molenbeek)
Analyse paysagère (EDM) : 
Type de paysage (campagne, ville, industriel)
Parc royal de Bruxelles
Découverte des bâtiments autour du parc (fonctions) – Historique du parc
Centre historique de Bruxelles
Naissance de Bruxelles et son développement au Moyen-Age  et après (développement urbain et économique, voutement de la senne et légendes de Bruxelles)
le Rouge-Cloitre (Auderghem)
Découverte nature du parc (les oiseaux)
Historique du cloitre (les moines)
Atelier de calligraphie (écriture des moines au Moyen-Age)

Des fiches en annexe présentent les objectifs et l’exploitation de quelques activités organisées par notre DASPA par Pauline Paquet, enseignante EDM en DASPA.
Conclusion

Les disciplines non linguistiques sont encore au début de leur histoire au sein de l’Histoire du FLE. Quelques auteurs se sont penchés sur le français de scolarisation ces dernières années, mais peu ont développé le concept avec des pistes qui peuvent aider concrètement l’enseignant dans sa pratique quotidienne, en particulier dans les classes DASPA en Belgique.

Les élèves FLE de DASPA ont besoin des DNL pour s’intégrer au mieux et continuer leur études secondaires, et les DNL ont besoin du français de scolarisation pour aider l’élève à comprendre les concepts et les consignes. Cette interconnexion sera au cœur des outils en EDM  qui sont en préparation avec l’aide du SEGEC pour aider les enseignants titulaires de cours de DNL en DASPA.

Cette formation des enseignants en FLE est d’ailleurs l’un des enjeux cités par Michèle Verdelhan-Bourgade[16] dans son livre. Elle conclue : « Après leur sensibilisation à l’existence et à la nature du Français de scolarisation, cette formation devra porter sur  l’oral en compréhension et production et sa liaison avec l’écrit, les aspects  spécifiques de la scolarisation dans la communication et le discours scolaire, les savoirs sur la langue dans leur relation aux disciplines et à l’usage social ».

Des formations en stage d’été existent en France (CAVILAM de Vichy, CLA de Besançon), mais actuellement rien n’est proposé à ce sujet en Belgique. Une réflexion devra être menée dans le futur sur la formation des enseignants de DNL. Devrons-nous former des régents FLE aux DNL ou des régents de disciplines au FLE. ? Actuellement, aucune des deux possibilités n’existe. Grâce à Luc Collès, le certificat en didactique du FLE à L’UCL à Louvain-la-Neuve permet à des enseignants de disciplines de se former au FLE, son existence devrait donc être pérennisée et ses moyens renforcés pour permettre de répondre à cette demande.

Dans un DASPA, nous ne sommes pas seulement en charge de la formation d’un futur élève qui sera intégré dans l’enseignement secondaire, mais c’est également la formation d’un futur citoyen qui est en jeu. L’apport des DNL, et en particulier en Etude du milieu (histoire et géographie) lui servira tout au long de sa vie future en Belgique.




Bibliographie

Cavalli Marisa, (se) former à l’enseignement des langues et d’autres disciplines, extrait de Formation initiale et profils d’enseignants de langue, sous la direction de Mariella Causa, de boeck,  2012, p127
Demarty-Warzée Jacqueline, Module 2 Le discours des disciplines, Le professeur de « Disciplines non linguistiques », ADEB, 2011 p.29
Demarty-Warzée Jacqueline, Notes de cours dans le cadre du stage du stage « Enseigner le français, enseigner en français dans les filières bilingue » au CLA de Besançon, juillet 2013
Peutiot fabrice, Le français comme langue de scolarisation, Cap sur le Français de la scolarisation, 2012, p.141-142
Verdelhan-Bourgade Michèle, Le Français de scolarisation pour une didactique réaliste, Vendôme (France), Education et Formation PUF, 2002, p225
Vignier Gérard, Module 1 Enseignement des disciplines et usage des langues, Le professeur de « Disciplines non linguistiques », ADEB, 2011 p.24

Annexes



Fiche d’activité : « les scientifiques du Monde »
Objectifs
Linguistiques
Savoir et savoir-faire discipline
Lexique des métiers et des disciplines scientifiques
Présentation d’un personnage :
Il est né le (date)…. à (ville) en/au (pays).
Il est mort le (date)…. à (ville) en/au (pays).
Placer sur une ligne du temps les scientifiques par grandes périodes historiques
Classer les scientifiques par discipline
Déroulement – Exploitation
1)      Révision de la ligne du temps et des grandes périodes historiques. Les élèves vont placer les scientifiques sur une ligne du temps.
2)      Classer dans un tableau à double entrée les scientifiques par domaine de recherche (math, médecine, chimie, physique, géographie)








Fiche d’activité : « Fiches sciences-histoire-FLE »
Objectifs
Linguistiques
Savoir et savoir-faire discipline
Ecrire une petite biographie du scientifique (information de base naissance-décès, formation de base, son œuvre majeure)
Définir une notion scientifique établie par ce scientifique
Rechercher, lire et interpréter l’information scientifique
Déroulement – Exploitation
1)      Chaque élève choisit 5scientifiques dans les cartes et effectue une recherche pour compléter le document (un tableau à 3 colonnes : histoire-science-FLE)
2)      Lorsque les 5 fiches (colonnes histoire et sciences) sont établies et corrigées, l’enseignant leur demande quelles sont les difficultés linguistiques (vocabulaire nouveau, éléments syntaxiques). Ainsi l’enseignant pourra compléter la colonne FLE avec ces éléments à travailler sur chaque fiche.
3)      Un classeur sera constitué avec l’ensemble des fiches réalisées par les élèves.


Fiche d’activité : « Visite du parc du Scheutbos »
Objectifs
Linguistiques
Savoir et savoir-faire discipline
Lexique géographique du paysage et du parc
Connecteurs de la direction (vers, jusqu’à)
Verbes de déplacement (aller, sortir, prendre, descendre, monter, marcher)
Ex : Je sors de l’école, je marche jusqu’à l’arrêt de bus, je monte dans le bus …
Se repérer sur un plan (plan de Bruxelles, de Molenbeek)
Caractériser un paysage (urbain, rural, industriel)
Identifier différents lieux du parc (verger, potager, bois, chemin)
Caractériser un paysage en utilisant la division en plans  (avant-plan, moyen-plan, arrière-plan)
Déroulement – Exploitation
1)      Préparation à la visite (4 heures): apprentissage du lexique géographique du paysage (arbre, bois, forêt, ruisseau, rivière, fleuve, chemin, route, ..) et du parc (statue, banc, chemin)
Fiche-outil : comment lire une carte/un plan ? Observation de carte et plans et identification des caractéristiques communes et des différences. Rappel sur le rose des vents
Situation des lieux dans l’espace : on situe sur un plan de la commune les parcs, les écoles, les chaussées etc..
Recherche et préparation du trajet
2)      La visite (4 heures): travail par groupe. Les élèves ont un questionnaire à remplir à partir du leurs observations. Ils suivent un itinéraire de 1 à 10.
3)      La synthèse : exercices d’identification du paysage. Les élèves doivent qualifier des paysages à partir de l’observation de photos.
Exercices d’analyse paysagère (avec la division par plans avec une photo prise au parc
Identification et caractérisation du paysage du parc
Fiche-savoir : les types de relief : élaboration d’un tableau de synthèse de types de relief à partir de l’observation de photos. Les élèves classent les photos en fonction de caractéristiques communes. Explications des reliefs (fiche de vocabulaire).
Selon le niveau et le temps, on peut ajouter une activité sur l’écologie. Les élèves apprennent des mots de vocabulaires comme « site protégé », « zone écologique » etc.
4)      Evaluation écrite : phase de transfert
Exercice de localisation de lieux sur un plan de Bruxelles dans une autre commune  avec un test de connaissance sur le vocabulaire




[1] Verdelhan-Bourgade Michèle, (2002, 225)
[2] Cavalli Marisa (2012, 127)
[4]Vignier Gérard (2011, 24)
[5]Demarty-Warzée Jacqueline (2011, 29)
[6]Demarty-Warzée Jacqueline (2011, 31)
[7]Verdelhan-Bourgade Michèle, (2002, ???)
[8] Verdelhan-Bourgade Michèle (2002, 234-237)
[9] Verdelhan-Bourgade Michèle (2002, 238)
[10] Cavalli Marisa (2012, 139)
[11]Demarty-Warzée Jacqueline (2011, 33)
[12] Vignier Gérard (2011, ??)
[13] Demarty-Warzée Jacqueline (2013)
[14] Demarty-Warzée Jacqueline (2013)
[15] Peutiot fabrice (2012, 141-142)
[16] Verdelhan-Bourgade Michèle, Le Français de scolarisation pour une didactique réaliste, Vendôme (France), Education et Formation PUF, 2002, p245

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