La
didactique du Français de scolarisation dans le cadre du cours d’Etude du
milieu en DASPA
Auteur :
Yohann Fleury (coordinateur DASPA – Institut de la Providence, Anderlecht)
Co-auteurs :
Youssef Bouazza et Pauline Paquet (enseignants
DASPA – Institut de la Providence)
Introduction
Pendant
plusieurs années en classe passerelle, beaucoup d’écoles ont privilégié
l’apprentissage du français exclusivement : en effet, les heures de Formation scientifique (seulement les 4
heures de mathématique) et de formation humaine (sciences humaine) étaient
réduites et réinjectées dans les cours de Français.
Les DNL (disciplines non linguistiques : sciences ou sciences humaines) sont
souvent simplement mises de côté. Le cours de math, en particulier, est souvent
abordé de manière purement disciplinaire : l’aspect linguistique FLE est
trop souvent négligé par manque de formation des enseignants de ces DNL.
A l’Institut de
la Providence d’Anderlecht, des cours de F.S.
sont donnés depuis le début (2OO1), mais depuis 2009, et l’arrivée d’une
nouvelle équipe de coordination et de direction, une réflexion a été menée sur
ces cours et l’organisation pédagogique a été revue pour répondre au mieux aux
missions.
Contexte légal et pédagogique
Selon les décrets du
14/06/2001 organisant la Classe passerelle et du 18/05/2012 organisant le
DASPA, nos missions sont :
1 – assurer
l'accueil, l'orientation et l'insertion optimale des élèves primo-arrivants
dans le système éducatif de la Communauté française;
2 – proposer un
accompagnement scolaire et pédagogique adapté aux profils d'apprentissage des
élèves primo-arrivants, notamment les difficultés liées à la langue de
scolarisation et à la culture scolaire;
3 – proposer une étape de scolarisation intermédiaire et d'une durée limitée, conformément à l'article 9 du présent décret, avant la scolarisation dans une classe de niveau ;
3 – proposer une étape de scolarisation intermédiaire et d'une durée limitée, conformément à l'article 9 du présent décret, avant la scolarisation dans une classe de niveau ;
par l’apprentissage ou le
renforcement du français, mais aussi par les DNL (disciplines non
linguistiques : math, sciences, histoire-géographie).
Dans notre école, à
l’Institut de la Providence à Anderlecht, la semaine de 28 heures de cours se
composent donc ainsi :
15 heures de formation humaine :
-
10 heures de
français
-
3 heures de
sciences humaines
-
2 heures
d’atelier dessin
8 heures de formation scientifique :
-
4 heures de
mathématique
-
2 heures de
sciences
-
2 heures de
travaux sur ordinateur
Ainsi que 3 heures
d’éducation physique et 2 heures de religion.
Actuellement, il existe beaucoup de méthodes de
français sur le marché pour donner le cours de Formation humaine (français)
aux primo-arrivants en DASPA (Dispositif d’accueil et de scolarisation pour
élèves primo-arrivants - ex-classe passerelle) en Fédération Wallonie-Bruxelles
de Belgique. Certaines, comme « Entrée en matière » intègrent
quelques éléments de sciences, de mathématiques voire de culture générale, mais
le contexte reste très franco-français.
Cependant, le cours de Formation
humaine, avec ses trois heures de sciences humaines par semaine, ne fait
pas l'objet d'un programme ou d'une méthode spécifique pour les professeurs qui
l'enseignent.
Contexte
Dans le cadre du DASPA (Dispositif d’accueil et de
scolarisation pour élèves primo-arrivants), nous accueillons, dans notre école,
des élèves entre 12 et 18 ans. Nous
avons différents groupes correspondant au niveau de scolarité et de
connaissance du français.
Selon l’origine des élèves, et leur âge, la
poursuite de leurs études secondaires se fera selon différents parcours
(CIE : conseil d’intégration élargie, fournissant une attestation
d’admissibilité), intégration en 1D (si pas de CEB) ou équivalence (sur base
des documents traduits amenés par les élèves).
Besoins
Lorsqu’ils seront intégrés dans l’une des années de
l’enseignement secondaire, les élèves auront des cours d’EDM ou de sciences
humaines. Les enseignants qui accueillent ces élèves remarquent souvent des
lacunes dans les savoirs spécifiques d’histoire et de géographie, et des
difficultés à comprendre les consignes par la non-connaissance de certains
savoir-faire.
C’est pourquoi, depuis 2009, à mon arrivée au poste
de coordinateur de la classe passerelle, il m’a semblé important que les élèves
aient un cours d’EDM dans la grille horaire. Nous y consacrons donc 3 heures
par semaine sur les 15 heures de formation humaine. Cependant, il n’existe pas
de programme spécifique au DASPA dans les différentes DNL (disciplines non
linguistiques : math, sciences, EDM).
Un cours d’EDM en DASPA a pour objectif de faire acquérir aux élèves le
vocabulaire et les connaissances de base
d'histoire et de géographie belge et
européenne pour une meilleure intégration dans l'enseignement secondaire belge
et dans leur future vie de citoyen belge.
Les élèves devront
également être capables :
● D’utiliser les outils de référence en EDM : l'atlas et la ligne du
temps
● De se situer dans l'espace et dans le temps.
Le
français de scolarisation de la discipline Histoire-géographie/EDM
Lors d’une conférence sur le DASPA devant des élèves
de Master FLE en novembre 2012, un étudiant m’a demandé si c’était un cours de
science ou de français. Ce n’est ni totalement un cours de sciences (avec des
élèves francophones), ni totalement un cours de FLE.
Michèle Verdelhan-Bourgade,
dans son ouvrage « Le Français de scolarisation »[1], écrit qu’à la différence du FLE, (un
enseignement scolaire comme une discipline parmi d’autres, sans répercussions
sur les autres matières), le « français de scolarisation sert à la mise en
place des savoirs dans les autres disciplines ».
D’après Marisa Cavalli, dans « Formation initiale et profils d’enseignants
de langues »[2], la
langue de scolarisation est une « langue officielle (une seule, voire
plusieurs langues dans certains états) ou variété étrangère dans laquelle sont
effectués les/des enseignements de disciplines dans le système scolaire. Cette
langue n’est pas toujours la langue « maternelle » des élèves ;
en tout état de cause, cette langue de l’école inclut des formes discursives
(écrites, en particulier) qui ne sont pas connues des jeunes apprenants ».
Elle précise que l’enseignement des langues de scolarisation se caractérise par
deux dimensions :
-
« langue
comme matière » avec ses composantes et ses objets propres d’apprentissage
-
« langue
des autres matières », quand elle est utilisée comme moyen pour
l’enseignement et l’apprentissage des autres matières à l’école (les DNL).
Les cours de DNL doivent trouver un juste milieu, un
point de rencontre, car notre objectif premier est d’aider l’élève à acquérir le vocabulaire et les connaissances
de base d’étude du milieu pour une meilleure intégration dans l'enseignement
secondaire belge.
Marisa Cavalli[3], explique qu’il y a une langue appropriée aux objets
disciplinaires et chaque discipline a ses propres objets, phénomènes,
évènements et processus à décrire, à analyser dans leur composantes, à
recomposer dans leur unité. Il ne s’agit pas seulement de lexique, comme
souvent même les enseignants expérimentés l’imaginent, bien que le lexique joue
un rôle de premier plan dans la construction conceptuelle et qu’il faille y
travailler. Ce sont, en effet, plutôt des genres discursifs spécifiques à
chaque discipline. On ne parle pas de la même façon d’un processus historique
ou d’un théorème de mathématique. Par contre, certains moyens sémiotiques ou
représentations conceptuelles peuvent être communes à plusieurs disciplines :
par exemple, les diagrammes utilisés en mathématiques, géographie, histoires,
sciences … ; les cartes employés en histoire, géographie, sciences,
etc ; la frise chronologique en histoire, en sciences… ; les symboles
mathématiques et en physique, etc ; d’autres peuvent être spécifiques à
certaines disciplines (les formules en chimie ou en mathématiques).
Sans la connaissance d’un vocabulaire spécifique, la
compréhension des consignes, mais également la maîtrise du discours
scientifique, l’élève risque d’être perdu après son intégration dans
l’enseignement secondaire.
Gérard Vignier[4]
explique qu’une discipline, scientifique ou artistique, a pour objectif la mise
en place et l’acquisition de savoirs ou de savoir-faire. Le langage verbal
assume, à cet effet, différentes fonctions :
-
Aider dans la classe à l’acquisition de
ces savoirs ou de ces savoir-faire
-
Nommer les notions, les concepts, les
opérations engagées, analyser et commenter les résultats.
D’après
lui, il existe une variété de DNL selon qu’elles sont classées dans les
sciences humaines, les sciences ou les mathématiques. Et tout
texte/discours scientifique est constitué d’un langage composite qui peut
comprendre :
-
Des éléments verbaux, mots inscrits dans
des phrases, dans des textes
-
Des éléments numériques, algébriques
-
Des éléments géométriques (tracés
divers)
-
Des éléments graphiques (courbes,
histogrammes, etc.)
-
Des éléments cartographiques
(représentations dans l’espace)
-
Des éléments schématiques combinant des
éléments figuratifs et/ou des symboles spécifiques
Pour Jacqueline Demarty-Warzée[5],
le discours désigne l’ensemble des messages, textes et documents – écrits et
oraux, iconiques, sonores ou autres – qui s’échangent dans un domaine
particulier. Elle parle de « discours scientifiques » pour aussi bien
pour les sciences humaines (histoire, géographie) ou les sciences « plus
dures » (physique, chimie Biologie et mathématiques). Chaque domaine disciplinaire possède ses
discours qui possèdent des caractéristiques remarquables.
Pour s’approprier les discours spécialisés d’une
discipline, elle conseille au professeur de DNL d’examiner de près les
manuels pour observer comment ils sont rédigés. Ainsi ils pourront
mieux découvrir comment fonctionne le français de leur discipline. Elle propose
trois entrées pour aller à la découverte des discours de disciplines[6] :
-
entrée lexicale ;
-
entrée par les structures
récurrentes ;
-
entrée discursive.
Entrée
lexicale
Le vocabulaire spécifique s’oppose généralement au
vocabulaire courant et sert à désigner des concepts ou des notions, des
phénomènes, des institutions, des éléments etc. relevant d’un domaine donné. Le
maitriser est indispensable. Certaines DNL ont un lexique très spécifique, mais
la plupart recourent à l’emploi de termes – substantifs, adjectifs, verbes –
qui ne prennent un sens spécifique qu’en fonction du contexte où ils se
trouvent. Il conviendra donc l’expliciter dans le contexte de la DNL. Dans
certains cas, le lexique spécifique sera mis en valeur dans les manuels, via
les mots-clés, ou alors il sera mis en italique, en gras, entre guillemets.
Michelle Verdelhan-Bourgade[7]
précise que les discours caractéristiques des manuels se disent dans une langue
dont l’appropriation par des élèves peut être considérée comme un facteur
capital de l’intégration scolaire. Pourtant la conception de la norme en
Français de scolarisation semble hésiter entre celle d’un français langue
internationale de prestige et celle d’une français proche des réalités du pays,
avec un net avantage à la première. Pourtant, si l’on veut intégrer au mieux un
élève de DASPA dans l’enseignement secondaire belge, le lexique scolaire belge
sera plus utile qu’un lexique de collège en France.
Histoire
|
Géographie
|
Lexique relatif au temps (jours, mois, saisons,
calendrier, siècle, ère etc.)
|
Lexique relatif aux continents, pays, nationalités,
capitales et villes, fleuve, mer et océan
|
Lexique relatif aux périodes conventionnelles de
la ligne du temps
|
Les 4 points cardinaux
|
Lexique relatif aux traces du passé (objet,
monument, doc écrit, photo)
|
Lexique relatif aux paysages (espace naturel,
urbain et industriel)
|
Moment-clé :
rupture, évènement
|
Lexique relatif aux modes de vie (activités et
technique : s’alimenter, se loger, se déplacer, se vêtir, se soigner)
|
Avec l’aide de notre enseignante
en EDM en DASPA, nous mettons également en place avec les élèves les plus
avancés en français ce que nous appelons « le bain belge » : l’enseignement de matière
spécifique du contexte belge comme :
-
Histoire belge :
o
Réaliser une ligne du temps des grandes
périodes de l'histoire de la Belgique avec les personnages historiques
(Ambiorix, Albert de Habsbourg et Isabelle d'Espagne, Napoléon, Guillaume 1er)
o
Réaliser une ligne du temps de la
monarchie belge depuis son indépendance (roi, reine, princes) Film « Daens »,
DVD "Moi, Belgique"
o
Travail de recherche sur l’histoire de
Bruxelles sur base d’un article
-
Histoire
européenne récente :
o
Réaliser
une ligne du temps des grandes étapes de la construction de l'Union européenne
o
Visite du point Info au Parlement
Européen
-
Culture belge :
o
Réaliser
une carte des spécialités culinaires belges
o
Réaliser un dossier sur les auteurs de
BD + visite du musée belge de la BD
-
Géographie
mondiale :
Etude de la carte du
monde, des continents et des pays de provenance des élèves
-
Géographie
européenne :
Réaliser une carte
d'Europe avec les pays, leur capitale, les mers
-
Géographie
belge :
Réaliser une carte de
la Belgique avec les provinces, les capitales de province, les fleuves et les
points culminants, les pays frontaliers, la mer.
-
Découverte de
Bruxelles :
Visite guidée historique et culturelle du centre de
Bruxelles avec découverte des transports en commun
Importance
des énoncés et des consignes
Nombres d’échecs dans la résolution des tâches
scolaires proviennent d’une mauvaise compréhension des consignes. On le voit
chaque année lors du CEB avec les élèves ex-classe passerelle. Pour n'importe
quel élève, mais encore plus peut-être pour des primo-arrivants, les énoncés et
les consignes doivent être clairs et compréhensibles pour leur permettre de
résoudre la tache ou l'exercice qui leur est demandé.
Michèle
Verdelhan-Bourgade[8]
voit deux raisons majeures à l’incompréhension des
consignes : les obstacles linguistiques et les consignes nécessitant des
opérations mentales.
Le vocabulaire des consignes mérite d’être travaillé
avec les élèves pour les aider à progresser. Certains mots tout à fait courant
dans le langage social changent de sens
dans le jargon scolaire :
Mots
|
Sens
social
|
Sens
scolaire
|
Ranger
|
Mettre
de l’ordre
|
Classer
|
Légende
|
Conte
|
Énoncé
sous un dessin
|
Relever
|
Mettre
debout
|
Repérer,
noter
|
L’exécution de la
consigne suppose d’abord des connaissances pragmatiques en matière de :
-
Situation
de classe, pour comprendre de quel
domaine de connaissances il s’agit ;
-
Références
extérieures, les énoncés des problèmes faisant souvent appel à des faits de
société ou des éléments d’actualité.
Michèle Verdelhan-Bourgade[9] indique que pour
construire un programme pour un cours de DNL, on peut au préalable essayer de
classer les consignes en catégories :
-
Les
consignes comportant un geste graphique (souligner, encadrer, rayer, dessiner
…) ;
-
Les
consignes relevant de catégories mentales générales (analyse, synthèse,
classement…) ;
-
Les
consignes spécifiques d’une discipline (calculer, soustraire, dater …) ;
-
Les
consignes concernant des opérations discursives (nommer, décrire, raconter,
expliquer…).
Elle ajoute que beaucoup de consignes basiques
concernent souvent deux ou davantage de disciplines, ce qui constitue un
argument supplémentaire à un travail langagier sur les DNL.
Consignes
|
Disciplines
|
Épeler,
nommer
|
Français,
sciences, histoire-géo
|
Classer
|
|
Faire
correspondre
|
Français,
sciences, math
|
Les différents auteurs montrent bien qu’il est
nécessaire de travailler ce type de discours, dont la compréhension et
l’exécution vont conditionner une grande partie de la réussite de l’élève
primo-arrivant après son intégration dans une classe de l’enseignement
secondaire.
Comme le dit Marisa
Causa[10],
l’enseignement/apprentissage d’une discipline aboutit à l’acquisition, au moins
partielle, d’une langue et d’une culture caractérisée par ses propres genres de
discours, susceptible d’enrichir et de diversifier l’identité même de
l’apprenant, le transformant en membre d’une communauté de pratiques.
Elle insiste sur le
lien entre les disciplines et le monde réel : « si l’on dit des
langues qu’elles sont autant de façon d’interpréter le monde, on peut en dire
autant des disciplines. Chacune est une façon de (perce)voir le monde, une
vision/perception/conception du monde.
Entrée par les structures récurrentes
Dans son article[11],
Jacqueline Demarty-Warzée a mis en évidence les structures temporelles
récurrentes dans la DNL d’histoire-géographie.
Marqueurs
temporels
|
Exemples
|
Les
dates
|
Le 21 juillet
1830, en l’an 800, en ce moment, jusqu’à présent, de nos jours, à cette
époque ….
|
Avant, après,
plus tôt, plus tard, souvent, parfois, jamais
|
|
Depuis
|
Depuis les
années septante …
|
Pendant
|
Pendant le règne de Léopold II …
|
Pendant que,
tandis que, alors que
|
Pendant que
la Reine Elisabeth soignait les malades…
|
À partir de
|
A partir de
l’invasion allemande en 1940 …
|
Il y a
|
Le Roi
Beaudouin est mort Il y a 20 ans.
|
De … à
|
Le roi Albert
II a régné de 1993 à 2013.
|
De nos jours
(= actuellement)
|
De nos jours,
la population belge est …
|
Dès
|
Dès la
promulgation de l’arrêté royal, …
|
Autres
marqueurs
|
Exemples
|
Marqueurs spatiaux : à droite, à gauche, au
sud, à l’est, à l’ouest, au nord, en face, devant, derrière, entre …
|
La
Belgique se trouve au nord de la France.
|
Marqueurs de la cause : à cause de, grâce à,
faute de, puisque …
|
La
Révolution belge a eu lieu à cause de …
|
Marqueurs de la conséquence : ainsi, c’est
pourquoi, les verbes : entraîner, provoquer
|
|
le but : en vue de, pour/afin de …
|
|
de l’opposition : mais, cependant, en
revanche, par contre …
|
Entrée
discursive
D’après Gérard Vignier[12],
les DNL des sciences humaines font usage du langage verbal, pour désigner,
définir les notions, entreprendre les opérations de raisonnements, commenter
documents et schémas, consigner des résultats.
Dans les manuels d’histoire, on trouve des documents
variés comme point de réflexion et d’analyse pour les élèves (avec souvent des
présentations différentes et des images) et des textes à fonction expositive
plus ou moins longs qui s’articulent avec ces documents.
Le professueur de DNL devra aider ses élèves à
décoder les types de discours :
Texte
descriptifs :
Jacqueline Demarty-Warzee[13]
explique que, dans la plupart des disciplines, il est demandé à l’élève de
décrire ce qu’il fait, ce qu’il voit etc. Or, on peut apprendre à décrire, soit
à comprendre des descriptions, soit à en produire soi-même dans le cadre des
activités scolaires.
Quelques régularités sont remarquables :
-
Mots en relation avec les cinq
sens :
-
Présence de mots évoquant l’espace, le
lieu :
-
Emploi de verbe d’état : être,
paraître, sembler, etc.
-
Comparaisons et métaphores
-
Emploi de l’imparfait ou du présent
(voire le passé simple en histoire)
Narration :
Jacqueline Demarty-Warzee [14] explique
que certains marqueurs de la narration sont remarquables dans les textes
d’histoire :
-
L’emploi de certains temps comme le
passé simple ou le présent de narration. Il faut remarquer que le passé simple
n’est bien-sûr pas le premier temps étudié en FLE. Le professeur de DNL devra
décoder les verbes pour la bonne compréhension du texte d’histoire.
-
Les marques typographiques ou
entailles : les mots en gras, en italique, entre guillemets ou en lettres
capitales sont courant dans les textes d’histoire. Leur présence n’est pas
innocente, il faudra les décoder avec les élèves :
Ex : l’Entente cordiale – la Drôle de guerre – Chaque
tribu a sa capitale, appelée « oppidum ».
-
Description connotative : Les
descriptions ne sont pas toujours dénotative, mais contiennent parfois des
symboles. Certains mots peuvent avoir plusieurs sens, une valeur positive,
négative ou neutre. Il est important de décoder ces sens avec les élèves :
Ex : le
roi Soleil : le mot Soleil
a une autre valeur que dans « la distance Terre-Soleil » ou le
soleil, cause de cancer de la peau.
Reformulation :
Reformuler, c’est dire la même chose autrement, en
résumant ou en développant. Des marqueurs spécifiques peuvent aider à
reconnaitre la reformulation :
-
Connecteur métadiscursif
« c’est-à-dire »
-
Certains procédés linguistiques :
o
En d’autres termes, en un sens, en
somme, en résumé, en bref, ou, ou bien, ou bien encore
o
La juxtaposition : X, y :
Albert Ier, le roi chevalier
o
La reprise anaphorique
o
Terme comme une sorte de, une espèce de, un genre de, etc.
o
Synonymes : Le roi, ce monarque
éclairé …
o
Verbe être : La Belgique est une
monarchie constitutionnelle.
Argumentation :
En sciences humaines, on utilise l’argumentation
pour défendre une thèse ou un point de vue pour convaincre, c’est-à-dire pour
modifier l’univers de croyance d’autrui. Elle peut se reconnaître avec :
-
Des articulateurs logiques : certes
… mais ; mais ; néanmoins/reste que/pourtant/toutefois/cependant, etc
-
Marques de personnes : je / nous /
on / tu / vous
-
Le temps du discours : présent,
passé composé, futur proche
-
L’utilisation de guillemets,
d’italiques, de parenthèses, de points d’exclamation ou d’interrogation etc.
Pistes
didactiques
Comme le dit Fabrice Peutiot[15],
du CASNAV de Grenoble, il faut mettre en place un apprentissage continu en
compréhension de l’oral et de l’écrit en Français langue de scolarisation,
pratiquer une pédagogie du projet, en approche actionnelle en
interdisciplinarité. Le professeur de FLE et de DNL devraient travailler
ensemble pour créer ce type de projet.
Depuis cette année scolaire 2012-2013, notre équipe
d’enseignants travaillent, en collaboration avec des conseillers pédagogiques,
à la rédaction de référentiels pour les 3 DNL enseignées en DASPA. A l’aide du
socle des compétences, les compétences, les
savoir-faire et les savoirs spécifiques sont sélectionnés par niveau et une
réflexion est menée quant au français de scolarisation à enseigner dans ces
différentes branches.
Le référentiel en EDM, avec sa composante Français
de scolarisation, se présentera sous la forme d’un tableau reprenant les
savoir-faire communs, les savoir-faire et les savoirs spécifiques en histoire
et en géographie issus du « Socles de compétences ».
Un travail de répartition de ces savoirs a été
effectué en fonction de 3 niveaux :
-
Niveau 1 : élèves analphabètes
-
Niveau 2 : élèves du niveau CEB ou
entrée vers une 3ème professionnelle
-
Niveau 3 : élèves du niveau fin du
CE1D ou plus
D’autres pistes didactiques sont actuellement en
cours d’élaboration dans notre école :
-
Fiches
d’apprentissage Histoire-sciences-Français de scolarisation :
Un
jour, lors d’un échange avec Luc Collès, il m’a parlé de son enfance et d’une
enseignante qui, pour faire aimer les mathématiques aux élèves, voyait pour
chaque concept, l’histoire de ce concept : qui était le mathématicien à
son origine ? Dans quelles conditions avait-il élaboré ses théories ?
Cette
conversation m’a inspiré pour la
création des fiches d’apprentissage liant les sciences à l’histoire en y
incorporant les éléments de français de scolarisation nécessaire à la
compréhension du concept.
-
Jeux
de cartes sur l’histoire des scientifiques du monde
:
Dans
le cadre d’une collaboration avec Youssef
Bouazza, enseignant de FLE, nous avons demandé aux élèves de sa classe
en 2012/2013 d’effectuer une recherche sur une série de 10 familles de
scientifiques (antiquité, période arabo-andalouse, Moyen-Orient, Asie, France,
Belgique-Pays-Bas, Allemagne, Royaume-Uni-Etats-Unis, Europe du Nord, Europe du
Sud).
Ils
ont réalisé des petites cartes présentant les données de base (date et lieu de
naissance et de décès, métier, principales découvertes). Celles-ci ont été
plastifiées pour réaliser un jeu.
Celui-ci
peut être exploité soit en les classant par thématique scientifique, soit en
les classant sur une ligne du temps.
-
Propositions
d’activités liant EDM et FLS
Une
enseignante de l’Institut de le Providence, également bibliothécaire et
responsable des sorties pédagogiques
(future régente en Sciences humaines), Pauline Paquet, a développé diverses
activités d’EDM pour les élèves du DASPA.
Pour
chaque visite organisée pour les élèves primo-arrivants, elle a développé une
stratégie :
-
Préparation de la visite :
apprentissage du lexique, acquisition de savoir-faire et de savoirs spécifiques
qui sont utiles pour la visite
-
Au moment de la visite : travail
écrit individuel ou en groupe d’application des savoir-faire
-
Activité de synthèse :
-
Evaluation écrite
Visite
|
Thématique
|
Parc du Scheutbos
(Molenbeek)
|
Analyse paysagère (EDM) :
Type de paysage (campagne, ville,
industriel)
|
Parc royal de
Bruxelles
|
Découverte des bâtiments autour du
parc (fonctions) – Historique du parc
|
Centre historique de
Bruxelles
|
Naissance de Bruxelles et son
développement au Moyen-Age et après
(développement urbain et économique, voutement de la senne et légendes de
Bruxelles)
|
le Rouge-Cloitre
(Auderghem)
|
Découverte nature du parc (les
oiseaux)
Historique du cloitre (les moines)
Atelier de calligraphie (écriture des
moines au Moyen-Age)
|
Des
fiches en annexe présentent les objectifs et l’exploitation de quelques activités
organisées par notre DASPA par Pauline Paquet, enseignante EDM en DASPA.
Conclusion
Les
disciplines non linguistiques sont encore au début de leur histoire au sein de
l’Histoire du FLE. Quelques auteurs se sont penchés sur le français de
scolarisation ces dernières années, mais peu ont développé le concept avec des
pistes qui peuvent aider concrètement l’enseignant dans sa pratique
quotidienne, en particulier dans les classes DASPA en Belgique.
Les
élèves FLE de DASPA ont besoin des DNL pour s’intégrer au mieux et continuer
leur études secondaires, et les DNL ont besoin du français de scolarisation
pour aider l’élève à comprendre les concepts et les consignes. Cette
interconnexion sera au cœur des outils en EDM
qui sont en préparation avec l’aide du SEGEC pour aider les enseignants
titulaires de cours de DNL en DASPA.
Cette
formation des enseignants en FLE est d’ailleurs l’un des enjeux cités par
Michèle Verdelhan-Bourgade[16]
dans son livre. Elle conclue : « Après leur sensibilisation à
l’existence et à la nature du Français de scolarisation, cette formation devra
porter sur l’oral en compréhension et production et sa liaison avec
l’écrit, les aspects spécifiques de la
scolarisation dans la communication et le discours scolaire, les savoirs sur la
langue dans leur relation aux disciplines et à l’usage social ».
Des
formations en stage d’été existent en France (CAVILAM de Vichy, CLA de
Besançon), mais actuellement rien n’est proposé à ce sujet en Belgique. Une
réflexion devra être menée dans le futur sur la formation des enseignants de
DNL. Devrons-nous former des régents FLE aux DNL ou des régents de disciplines
au FLE. ? Actuellement, aucune des deux possibilités n’existe. Grâce à Luc
Collès, le certificat en didactique du
FLE à L’UCL à Louvain-la-Neuve permet à des enseignants de disciplines de
se former au FLE, son existence devrait donc être pérennisée et ses moyens
renforcés pour permettre de répondre à cette demande.
Dans
un DASPA, nous ne sommes pas seulement en charge de la formation d’un futur
élève qui sera intégré dans l’enseignement secondaire, mais c’est également la
formation d’un futur citoyen qui est en jeu. L’apport des DNL, et en
particulier en Etude du milieu (histoire et géographie) lui servira tout au
long de sa vie future en Belgique.
Bibliographie
Cavalli
Marisa, (se) former à l’enseignement des
langues et d’autres disciplines, extrait de Formation initiale et profils d’enseignants de langue, sous la
direction de Mariella Causa, de boeck,
2012, p127
Demarty-Warzée Jacqueline, Module 2 Le discours des disciplines, Le
professeur de « Disciplines non linguistiques », ADEB, 2011 p.29
Demarty-Warzée
Jacqueline, Notes de cours dans le cadre
du stage du stage « Enseigner le français, enseigner en français dans les
filières bilingue » au CLA de Besançon, juillet 2013
Peutiot
fabrice, Le français comme langue de scolarisation, Cap sur le Français de la
scolarisation, 2012, p.141-142
Verdelhan-Bourgade
Michèle, Le Français de scolarisation pour une didactique réaliste, Vendôme
(France), Education et Formation PUF, 2002, p225
Vignier
Gérard, Module 1 Enseignement des
disciplines et usage des langues, Le professeur de « Disciplines non
linguistiques », ADEB, 2011 p.24
Annexes
Fiche d’activité : « les scientifiques du Monde »
|
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Objectifs
|
|
Linguistiques
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Savoir
et savoir-faire discipline
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Lexique
des métiers et des disciplines scientifiques
Présentation
d’un personnage :
Il
est né le (date)…. à (ville) en/au (pays).
Il
est mort le (date)…. à (ville) en/au (pays).
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Placer
sur une ligne du temps les scientifiques par grandes périodes historiques
Classer
les scientifiques par discipline
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Déroulement
– Exploitation
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1)
Révision de la ligne du temps et
des grandes périodes historiques. Les élèves vont placer les scientifiques
sur une ligne du temps.
2)
Classer dans un tableau à double
entrée les scientifiques par domaine de recherche (math, médecine, chimie,
physique, géographie)
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Fiche
d’activité : « Fiches
sciences-histoire-FLE »
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Objectifs
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Linguistiques
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Savoir
et savoir-faire discipline
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Ecrire
une petite biographie du scientifique (information de base naissance-décès,
formation de base, son œuvre majeure)
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Définir
une notion scientifique établie par ce scientifique
Rechercher,
lire et interpréter l’information scientifique
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Déroulement
– Exploitation
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1) Chaque
élève choisit 5scientifiques dans les cartes et effectue une recherche pour
compléter le document (un tableau à 3 colonnes : histoire-science-FLE)
2) Lorsque
les 5 fiches (colonnes histoire et sciences) sont établies et corrigées,
l’enseignant leur demande quelles sont les difficultés linguistiques
(vocabulaire nouveau, éléments syntaxiques). Ainsi l’enseignant pourra
compléter la colonne FLE avec ces éléments à travailler sur chaque fiche.
3) Un
classeur sera constitué avec l’ensemble des fiches réalisées par les élèves.
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Fiche d’activité : « Visite du parc du Scheutbos »
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Objectifs
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Linguistiques
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Savoir
et savoir-faire discipline
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Lexique
géographique du paysage et du parc
Connecteurs
de la direction (vers, jusqu’à)
Verbes
de déplacement (aller, sortir, prendre, descendre, monter, marcher)
Ex :
Je sors de l’école, je marche jusqu’à l’arrêt de bus, je monte dans le bus …
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Se
repérer sur un plan (plan de Bruxelles, de Molenbeek)
Caractériser
un paysage (urbain, rural, industriel)
Identifier
différents lieux du parc (verger, potager, bois, chemin)
Caractériser
un paysage en utilisant la division en plans
(avant-plan, moyen-plan, arrière-plan)
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Déroulement
– Exploitation
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1) Préparation
à la visite (4 heures): apprentissage du lexique géographique du paysage
(arbre, bois, forêt, ruisseau, rivière, fleuve, chemin, route, ..) et du parc
(statue, banc, chemin)
Fiche-outil :
comment lire une carte/un plan ? Observation de carte et plans et
identification des caractéristiques communes et des différences. Rappel sur
le rose des vents
Situation
des lieux dans l’espace : on situe sur un plan de la commune les parcs,
les écoles, les chaussées etc..
Recherche
et préparation du trajet
2) La
visite (4 heures): travail par groupe. Les élèves ont un questionnaire à
remplir à partir du leurs observations. Ils suivent un itinéraire de 1 à 10.
3) La
synthèse : exercices d’identification du paysage. Les élèves doivent
qualifier des paysages à partir de l’observation de photos.
Exercices
d’analyse paysagère (avec la division par plans avec une photo prise au parc
Identification
et caractérisation du paysage du parc
Fiche-savoir :
les types de relief : élaboration d’un tableau de synthèse de types de
relief à partir de l’observation de photos. Les élèves classent les photos en
fonction de caractéristiques communes. Explications des reliefs (fiche de
vocabulaire).
Selon
le niveau et le temps, on peut ajouter une activité sur l’écologie. Les
élèves apprennent des mots de vocabulaires comme « site protégé »,
« zone écologique » etc.
4) Evaluation
écrite : phase de transfert
Exercice
de localisation de lieux sur un plan de Bruxelles dans une autre commune avec un test de connaissance sur le
vocabulaire
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[2]
Cavalli Marisa (2012, 127)
[4]Vignier
Gérard (2011, 24)
[5]Demarty-Warzée
Jacqueline (2011, 29)
[6]Demarty-Warzée
Jacqueline (2011, 31)
[8] Verdelhan-Bourgade Michèle (2002,
234-237)
[9]
Verdelhan-Bourgade Michèle (2002, 238)
[10]
Cavalli Marisa (2012, 139)
[11]Demarty-Warzée
Jacqueline (2011, 33)
[12]
Vignier Gérard (2011, ??)
[13]
Demarty-Warzée Jacqueline (2013)
[14]
Demarty-Warzée Jacqueline (2013)
[15]
Peutiot fabrice (2012, 141-142)
[16] Verdelhan-Bourgade Michèle, Le
Français de scolarisation pour une didactique réaliste, Vendôme (France),
Education et Formation PUF, 2002, p245
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